Depuis quelques années, les progrès de la recherche permettent de doter une espèce de caractéristiques qu'elle ne possède pas naturellement. Cette évolution a donné lieu à de nombreux travaux, motivés par l'énorme pouvoir que confère à l'homme la transgénèse : la capacité maîtrisée de créer de la diversité génétique, c'est-à-dire, la possibilité de transférer un gène d'un organisme à un autre, en s'affranchissant de la barrière de genre et d'espèce. Cet organisme, affecté de ce nouveau gène, est ainsi appelé Organisme Génétiquement Modifié (OGM).

Par exemple, les melons mûrissent ainsi moins vite, les fraises ne pourrissent plus, les tomates se conservent mieux… Tous ces produits n'ont pas encore fait leur apparition sur les étals français mais existent déjà aux Etats-Unis.

Mais d'une manière technique, comment obtient-on OGM ?

Comment obtient-on un OGM ?

Les techniques de transformation

La première phase du transfert consiste à isoler le gène d'intérêt par le biais de la sélection. Ce gène sera alors extrait, puis purifié avant d'être intégré dans une construction moléculaire qui est constituée de trois éléments :

  • un promoteur, c'est à dire une séquence placée en amont du gène et qui est nécessaire à sa transcription,
  • un gène d'intérêt, qui comprend également un marqueur visuel et marqueur de sélection,
  • un site de terminaison, séquence présente en aval et au niveau de laquelle l'élongation de l'ARN (Acide RiboNucléique) prend fin.

Comme les techniques d'introduction de ces constructions dans le génome demandent une grande quantité d'ADN (Acide DésoxyriboNucléique), il sera nécessaire de multiplier la construction. Cette opération est réalisée en introduisant celle-ci dans un plasmide doté d'une séquence qui lui permettra de se répliquer de façon autonome dans une bactérie-hôte.

La modification génétique d'un organisme se fait par deux approches :

1. Le transfert direct

La transformation directe consiste en l'introduction dans le génome d'un gène véhiculé le plus souvent par un plasmide classique (exemple : pUC), par le biais de techniques physico-chimiques.

La première méthode de transfert direct fut l'introduction mécanique d'ADN dans des protoplastes (cellules dont on a ôté la paroi pectocellulosique). La cellule peut alors être facilement transformée par des techniques chimiques ou physiques :

  • le polyéthylèneglycol (PEG), qui est un agent chimique possédant la faculté de déstabiliser la membrane plasmique des protoplastes, permettant ainsi la pénétration des molécules d'ADN,
  • l'électroporation, plus délicate à maîtriser, consiste à appliquer de courts chocs électriques de fort voltage aux protoplastes, ce qui permet l'ouverture de pores facilitant le passage de l'ADN. Le principal problème de ces deux méthodes est la faible capacité de régénération des protoplastes ainsi que le risque de voir apparaître un transfert de plusieurs copies, ce qui aura des répercussions sur la stabilité de l'insert ou de son expression.
  • La microinjection est une autre méthode de transfert physique, basée sur l'utilisation de microseringues manipulées sous microscope et permettant l'introduction directe de molécules, voire d'organites entiers, dans des cellules isolées. Cependant, cette méthode ne s'applique que dans des cas particuliers car elle est complexe et lourde à utiliser.
  • Parmi toutes ces techniques, la plus courante est l'utilisation du " canon à gènes ", également appelée biolistique. Cette méthode consiste à propulser le transgène à l'intérieur de cellules végétales, isolées ou appartenant à un tissu ou à un organe. Les constructions moléculaires sont adsorbées à la surface de projectiles microscopiques (billes d'or de 0,6 à 2 µm de diamètre), qui seront bombardés sur les cellules végétales. Ces billes seront progressivement freinées en traversant les différentes couches cellulaires. Quelques unes des cellules atteintes vont alors insérer spontanément les transgènes dans leur génome. La biolistique a ainsi été employée sur de nombreuses espèces végétales : blé, maïs, riz, soja, tabac...

2. Le transfert indirect

Le développement de la transgénèse végétale a connu son essor grâce à la découverte de bactéries telluriques phytopathogènes : Agrobacterium tumefaciens et Agrobacterium rhizogenes.

Ces micro-organismes sont capables de détourner à leur profit le métabolisme de certaines espèces végétales en faisant produire, aux cellules qu'ils infectent, des molécules nutritives (appelées opines) nécessaires à leur croissance. Il a été ainsi démontré que ce dérèglement cellulaire était dû à une véritable opération de génie génétique, dont les responsables sont des plasmides d'environ 200 kb : Ti et Ri.

En fait, suite à l'infection bactérienne, c'est l'intégration dans le génome de la plante d'un fragment de ces plasmides, le T-DNA, qui conduit au dérèglement métabolique. Les chercheurs ce sont donc servi de ces T-DNA pour pouvoir intégrer les gènes d'intérêt aux génomes des plantes (cf. annexe 1 - Transformation d'une cellule végétale).

Le principal avantage de la transformation par Agrobacterium est sa simplicité d'utilisation. Par ailleurs, dans 50% des cas, le transgène est intégré sous la forme d'une seule copie et sans contamination par des séquences plasmidiques externes au T-DNA.

Cependant il existe quelques inconvénients :

  • grande spécificité d'hôte des cellules souches d'Agrobacterium, ce qui limite son application aux espèces sensibles à son action,
  • persistance potentielle, pendant quelques mois, de la bactérie dans la plante, ce qui peut poser un problème pour le suivi de la plante,
  • limitation de la quantité d'ADN transférable.

Suivi de l'expression du gène

1. Sélection des cellules transformées

L'application des techniques de transgénèse à un explant végétal permet l'intégration du gène dans seulement un très petit nombre de ses cellules. Il faut donc sélectionner puis multiplier les cellules transformées, avant de régénérer la plante entière.

L'opération de sélection fait appel à deux catégories de gènes :

  • les gènes marqueurs conférant à la cellule transgénique une résistance à des substances chimiques toxiques (herbicides ou antibiotiques comme l'ampicilline ou la kanamycine). La sélection consistera à cultiver les cellules transformées sur un milieu contenant cette substance.
  • les gènes rapporteurs (ou marqueurs visuels, par exemple le gène GUS) codant pour des produits qui, dans certaines conditions, donnent une couleur caractéristique aux tissus transgéniques.

2. Régénération des plantes

La régénération est la phase durant laquelle les cellules, les tissus, ou les organes transgéniques sélectionnés sont placés dans des conditions qui leur permettront de générer une plante entière. Ceci ne sera rendu possible que par les techniques de culture in vitro.

3. Suivi du gène dans la plante

Pendant tout son développement, la plante néoformée sera étudiée grâce à des méthodes de biologie moléculaire (Southern ou Western-blot, PCR) afin de vérifier l'intégration des transgènes et d'analyser leur expression.

Le temps écoulé entre l'introduction du transgène dans les premières cellules végétales et l'obtention de la descendance varie entre 6 et 9 mois et dépend des techniques de culture in vitro et de la physiologie de chaque espèce. Selon le type de promoteur employé, on disposera des premières informations sur l'expression du transgène dès la régénération des premiers tissus, ou bien, seulement à l'obtention des semences.


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Dernière mise à jour le 06 mars 1999 19:36:54